Bon à savoir : peut-on refuser une construction en limite de propriété ?

Blandine Rochelle
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Lorsqu'un propriétaire souhaite ériger une construction à la limite de sa parcelle, des questions sur la légalité et les droits des voisins se posent souvent. Peut-on refuser une construction en limite de propriété ? Si la loi autorise généralement cette pratique, plusieurs règles et contraintes doivent être respectées afin de ne pas nuire aux voisins et à l’harmonie du voisinage. On vous en dit plus.

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Il est autorisé de construire jusqu'à la limite de propriété, en respectant certaines règles. © hansenn - Getty images
Il est autorisé de construire jusqu'à la limite de propriété, en respectant certaines règles. © hansenn - Getty images
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Une construction légale mais encadrée

En France, la loi permet à un propriétaire de construire sur son terrain jusqu’à la limite de propriété sans qu’il soit nécessaire de demander l’autorisation de son voisin. L'article R.111-19 du Code de l'urbanisme précise que, sauf disposition contraire du plan local d'urbanisme (PLU), un propriétaire a le droit de maximiser l’utilisation de son terrain, y compris en construisant à la limite séparative.

Cependant, cette liberté s’accompagne de certaines restrictions qui visent à préserver les droits des voisins. En effet, un permis de construire, même en limite de propriété, est toujours délivré sous réserve des droits des tiers.

Cela signifie que la construction ne doit pas empiéter sur les droits des voisins, qu’il s’agisse de leur intimité, de leur accès à la lumière naturelle ou de la préservation de leur bien immobilier. Si ces droits sont compromis, le voisin peut saisir la justice pour obtenir réparation ou exiger des modifications à la construction.

Les distances à respecter selon le type de construction

Construction en limite de propriété

Dans le cas où la maison ou l’édifice est construit directement sur la limite séparative, aucune distance minimale n’est imposée entre les deux parcelles. Cependant, certaines règles doivent être respectées, notamment celles concernant les ouvertures et les vues.

Le Code civil impose des restrictions strictes concernant les fenêtres qui pourraient donner une vue directe ou indirecte sur le terrain voisin. Les vues droites, par exemple, doivent respecter une distance minimale de 1,90 mètre, tandis que les vues obliques ne sont autorisées qu’à une distance minimale de 60 centimètres.

Ces règles visent à garantir une certaine intimité et à éviter les conflits de voisinage. Par ailleurs, si une construction existe déjà en limite de propriété, il est primordial de veiller à ce que la nouvelle ne provoque pas de gênes supplémentaires, notamment en matière d’ombre ou de nuisances sonores.

Construction en retrait de la limite de propriété

Si la maison n’est pas construite directement sur la limite séparative, une distance minimale de 3 mètres doit être respectée entre le bâtiment et la parcelle voisine. Ce retrait est indispensable pour permettre à chaque propriété de conserver une certaine intimité et pour éviter un entassement des constructions.

Cependant, il est important de noter que cette règle peut varier en fonction des communes et des dispositions locales. Il est donc recommandé de consulter le plan local d'urbanisme en mairie pour vérifier les règles spécifiques à votre commune.

Dans certaines situations, notamment lorsque la hauteur de la construction dépasse 10 mètres, la distance de retrait peut être portée à 5 mètres. Ces mesures visent à garantir une densité de construction raisonnable et à prévenir des risques tels que les incendies, en permettant un accès plus facile aux secours ou aux travaux de maintenance.

Pour vérifier la distance entre la maison et la limite de propriété, la mesure est faite à l’aplomb, c’est-à-dire sans tenir compte de la pente, à l’horizontale. Elle se fait entre la limite de votre terrain et celle de votre maison.

Les règles locales et les servitudes

Outre le Code de l’urbanisme, il est crucial de prendre en compte les réglementations locales. Le plan local d'urbanisme (PLU) ou le plan d'occupation des sols (POS), lorsqu'il est encore en vigueur, dicte les règles spécifiques à chaque commune. Certaines municipalités imposent des restrictions supplémentaires, comme des hauteurs maximales de construction ou des distances à respecter entre les habitations. Par exemple, la hauteur d'un mur de clôture peut être limitée à 3,60 mètres dans les communes de plus de 50 000 habitants et à 2,60 mètres dans les communes plus petites.

Il est aussi essentiel de vérifier l’existence de servitudes. Une servitude de vue, par exemple, peut imposer certaines distances minimales entre les ouvertures d'une maison et la parcelle voisine. De même, une servitude de passage pourrait empêcher la construction en limite de propriété si elle porte atteinte aux droits de passage du voisin.

La suppression de la tolérance pour les empiètements

Jusqu’à récemment, une certaine tolérance était accordée aux constructions en limite de propriété, notamment en ce qui concerne les petits empiètements. Par exemple, il était possible que les fondations d'une maison ou l’enduit d’un mur débordent légèrement sur le terrain voisin.

Cependant, cette tolérance a été supprimée par un arrêt de la Cour de cassation en date du 4 mars 2021. Depuis cette décision, il n’existe plus de « petit empiètement ». Toute partie d’une construction qui dépasse la limite séparative, même de quelques centimètres, peut être contestée par le voisin.

En cas de litige, le propriétaire qui empiète sur le terrain voisin risque des sanctions importantes, pouvant aller jusqu’à la démolition de la partie fautive de la construction. Il est donc fortement recommandé de laisser un espace de sécurité, même minime, pour éviter tout risque d’empiètement.

Les recours possibles pour les voisins

Si un voisin estime que la construction en limite de propriété porte atteinte à ses droits, il peut entreprendre plusieurs démarches pour faire valoir ses intérêts. Un recours gracieux peut être déposé auprès du maire pour contester la délivrance du permis de construire. Ce recours doit être justifié par des preuves tangibles de préjudice, telles qu’une perte d’ensoleillement, une atteinte à l’intimité ou un trouble anormal de voisinage. Ce dernier peut être invoqué en vertu des articles 544, 1240 et 1241 du Code civil.

Si le recours gracieux n’aboutit pas, il est possible de porter l’affaire devant les juridictions civiles. Dans ce cas, le plaignant doit prouver que la construction lui cause un dommage direct et substantiel. En revanche, si le permis de construire respecte pleinement les règles d’urbanisme et les servitudes, le recours peut être plus difficile à gagner.

Dans certains PLU, les débords de toiture, les décorations ou les moulures peuvent être pris en compte. Encore une fois, il est fortement recommandé de vérifier cette information dans le PLU ou après d’un professionnel.

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